GEOSTRATEGIES 2000 ET LES ANCIENS DE L’ECOLE POLYTECHNIQUE : DES EVOLUTIONS SIMILAIRES, UNE COOPERATION RENFORCEE
par
François Xavier MARTIN
Vice-Président de l’Association des anciens élèves de l’Ecole polytechnique
On peut relever certaines similitudes entre le parcours de Géostratégies 2000 et celui de la communauté polytechnicienne, qui tous deux s’intéressent maintenant activement à pratiquement tous les types de problèmes du monde actuel, à partir d’un point de départ essentiellement focalisé sur les questions de défense. A cet égard, un bref rappel historique n’est pas inutile. Créée en 1794 pour alimenter l’ensemble des services de l’Etat, et accessoirement les entreprises, en ingénieurs, scientifiques et cadres techniques de haut niveau, l’Ecole Polytechnique avait connu, après la défaite de 1871, un très fort recentrage de ses débouchés vers les activités de défense : ingénieurs militaires (dont les créateurs du fameux canon de 75 !), officiers du génie et de l’artillerie, enseignement militaire et Etat-Major (Foch), commandement (Joffre). Ce recentrage de l’Ecole apporta (au prix de la disparition de plus de 900 élèves et anciens) une contribution essentielle à la victoire de 1918. De même, après la deuxième guerre mondiale, et bien que les polytechniciens se soient faits de plus en plus rares parmi les officiers, les X ingénieurs militaires jouèrent un rôle éminent dans la mission, considérée jusque là par beaucoup comme impossible, de réaliser et mettre en service, sans aide étrangère, une force de dissuasion nucléaire nationale crédible, à un coût supportable pour la puissance de taille moyenne qu’était devenu notre pays.
La fin de la guerre froide ne pouvait manquer d’avoir des conséquences importantes sur ce type d’activités. Les dangers, certes immenses, mais relativement bien identifiés, du monde bipolaire dans lequel nous avions vécu pendant quelques décennies sont maintenant remplacés par des menaces beaucoup plus variées, difficiles à analyser, et donc à contrecarrer. Simultanément, une guerre économique mondiale, où ce ne sont plus des armées, mais des entreprises qui s’affrontent, impose à notre pays un redéploiement complet de ses élites. Un profond effort de compréhension de tous les aspects de ce monde du début du XXIème siècle est donc maintenant une impérieuse nécessité. Fort heureusement, les successeurs des pères fondateurs de notre école ont mis sur pied un important programme de réformes, qui cherche tout à la fois à conserver certains acquis indiscutables (un très haut niveau scientifique, obtenu par la conjugaison d’une sélection rigoureuse, et d’un corps enseignant d’une qualité exceptionnelle), et à remédier à certaines faiblesses passées de ce type de formation (importance excessive accordée aux seuls éléments cartésiens, prise en compte insuffisante des facteurs humains, habitude de l’effort solitaire, plutôt que du travail en équipe, mauvaise aptitude à la communication, surtout orale, manque d’ouverture internationale). Concrètement, l’X offre maintenant à ses élèves un cursus rénové, d’un peu plus de quatre ans après le concours d’admission. Cette réforme permet aux futurs polytechniciens de continuer à bénéficier d’un enseignement scientifique diversifié d’un niveau exceptionnel ; simultanément, l’accent est mis sur une formation humaine de qualité, leur permettant de connaître, au cours de plusieurs stages, des milieux extrêmement variés, parfois même surprenants ; enfin, ils bénéficient d’une vaste ouverture sur le monde du XXIème siècle, par la fréquentation quotidienne de leurs camarades étrangers (20 % de l’effectif total des élèves, maintenant recrutés très au-delà de la francophonie traditionnelle) et les nombreux stages et formations complémentaires hors de France qui leur sont proposés.
Comme le souligne son président Serge Rechter, Géostratégies 2000 aussi réfléchit sur son devenir et son rôle dans le débat d’idées. Le Club est d’abord un espace de liberté pour la discussion collective, et cela ne peut bien entendu qu’intéresser tous les citoyens responsables, quelles que soient leurs appartenances professionnelle, universitaire, philosophique, politique, sociale, … Si le socle de réflexion reste la Défense, au sens le plus large, et sa relation aux questions géostratégiques, le Club se sent concerné par toutes les transformations susceptibles d’influencer la capacité de décision de la France, et l’appropriation des questions de défense ou de sécurité par le corps social. La lettre que Serge Rechter nous a adressée le 9 octobre dernier, suite aux événements internationaux et au débat intervenu avec le Juge Bruguière sur le terrorisme, est claire sur ce sujet.
Les évolutions, à certains égards similaires, de Géostratégies 2000 et de la communauté polytechnicienne, ont conduit Serge Rechter à penser qu’il serait judicieux d’élargir la participation des Anciens X, initialement limitée à celle du Groupe X-Défense, à l’ensemble des membres de la Société Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole Polytechnique (ou AX). C’est la raison pour laquelle
Géostratégies 2000 et l’AX se sont associés, pour permettre à tous les membres de l’AX qui le souhai-tent de participer aux activités du Club. L’AX invitera donc désormais tous ses adhérents, par l’intermédiaire de sa revue mensuelle " La Jaune et la Rouge " et de son site Internet, à adhérer individuellement à Géostratégies 2000, en soulignant la qualité des sujets de réflexion proposés, ainsi que l’habituelle pertinence du choix des intervenants. Je note d’ailleurs avec plaisir que, parmi ceux qui nous seront proposés dans un proche avenir, deux , Jean-Louis Gergorin et Michel Pébereau, sont des anciens de l’X. Ils suivront certains de leurs camarades, qui sont déjà venus débattre à Géostratégies 2000, notamment Noël Forgeard ou Paul Quilès, pour ne citer qu’eux.
François-Xavier Martin